Cet expert s’est confié au journaliste Alphonse Ndongo, spécialiste des questions économiques et financières qui évolue à Brazzaville.
Un expert congolais en matière de finances publiques, et pas des moindres, consultant international, que nous appelons ici Joseph pour des raisons de sécurité, nous a accordé une interview exclusive. Le fin limier des finances publiques essaie de se mettre en levitation pour évoquer les vraies raisons, d’après lui, de la defenestration du désormais ex argentier congolais.
P Comment expliquez-vous la sortie prématurée d’Andely ?
Joseph: La sortie prématurée du ministère Andely s’explique par deux facteurs essentiels dont une exogène et l’autre endogène.
Le facteur exogène est lié à la crise en Ukraine qui a fait bondir les prix de l’or noir, donnant ainsi au Congo une surface financière… Ce qui a fait réveiller des vieux réflexes de la dilapidation des deniers publics, notamment avec des dépenses inutiles.
Le deuxième est dû à ses rapports exécrables avec le premier ministre. Les deux personnes n’arrivaient pas à s’accorder sur la qualité des ressources humaines appelées à occuper les postes à responsabilités au trésor.
Des cadres de l’enseignement au Trésor public? Inadmissible pour Andely!
Pensez-vous que le contrôle de la direction générale du Trésor constitue le principal mobile ayant conduit à sa défenestration?
Joseph: Absolument. Le Trésor public est l’organe technique qui assiste le ministre des finances dans l’exécution du budget de l’État. Par -là, il faut entendre, le recouvrement de toutes les recettes et paiement des dépenses publiques. Celui qui a le contrôle du Trésor public a le contrôle de l’Etat!
Dans sa forme actuelle, avec un directeur général retraité, des fondés retraités et des directeurs centraux et départementaux quasiment tous retraités, il est clair qu’Andely n’a pas pu y imposer son style. D’ailleurs, le pouvait- il? Lorsque l’on sait que les nominations sont faites sur proposition de ce dernier et entérinées par le premier ministre.
Il faut aussi souligner que la gestion des fonds publics par une banque privée a toujours été mal vue par le directeur général du trésor, réputé très influent dans les cercles du pouvoir à Brazzaville.
Que peut-on retenir du bref passage d’Andely au ministère des finances ?
Joseph: Le ministre Andely a amélioré la qualité de la dépense publique. Tous les acteurs de la société peuvent s’en convaincre… Retraités et fonctionnaires l’attestent. À l’intérieur du pays, ces derniers pouvaient attendre deux semaines voire un mois avant d’être payés.
Le vrai problème qui se pose à notre gouvernance est celui des soins à apporter à la qualité de la dépense publique. Pour cela, il faut exclure des sorties abusives d’argent, des missions et séminaires farfelues sans réel impact…
Le climat d’animosité entre Andely et ses collègues du gouvernement provient de là.
Andely 2 n’était-il pas différent d’Andely 1?
Joseph : Oui, Andely 2 m’a paru laxiste, familial et affairiste. Pas cependant autant que certaines autorités congolaises dont les noms sont constamment cités dans la presse internationale et rapports des ongs.
En ce qui concerne Andely, je vais illustrer mes propos par la situation des retraités au niveau des régies financières. Au budget il agit sous pression des syndicalistes alors qu’au Trésor public et à
ailleurs, il maintient le statut quo. Un véritable paradoxe. En plus, l’une de ses erreurs, c’est qu’il a voulu » familiariser son cabinet ! Les enfants, neveux, femmes… Ces derniers faisaient sortir de l’argent au trésor public.
Ils bénéficiaient de plusieurs marchés juteux. Il faut aussi noter le mauvais rôle joué par son directeur de cabinet , accusé par certaines mauvaises langues d’exiger 20% voire 30% avant tout paiement à un opérateur économique(Ndlr grave accusation que nous essayons de creuser avec témoignages). Andely a oublié qu’il était au pouvoir mais pas du pouvoir. Une nuance à relever…
Propos recueillis par A.Ndongo, journaliste économique et financier, Brazzaville Congo.