POLITIQUE

Suite aux nombreuses plaintes des barons, Sassou lâche Kiki et choisit Omar Denis Junior

• Bookmarks: 16974


Malgré une active communication, le ministre de la coopération internationale peine à s’imposer au sein du gouvernement où plusieurs ministres s’agacent de son activisme. Sa loi « PPP » n’a toujours pas été présentée et le chef de l’Etat congolais le maintien à bonne distance des affaires présidentielles.

La scène a suscité un certain malaise au sein du gouvernement. Le 13 septembre, le ministre de la coopération internationale et des partenariats public-privé (PPP), Denis Christel Sassou Nguesso, dit « Kiki », a prononcé un discours sur la propriété intellectuelle. Une adresse en apparence anodine si elle n’avait pas été effectuée en lieu et place d’un autre ministre du gouvernement congolais, Antoine Nicéphore Thomas Fylla Saint-Eudes, à la tête du portefeuille du développement industriel.

Dossier rwandais

Si l’épisode a fait grincer des dents à Brazzaville, c’est que ce n’est pas la première fois que le fils du président congolais Denis Sassou Nguesso élargit ses prérogatives au-delà de son ministère. Jouissant d’un portefeuille aux contours flous, ses attributions s’étendent de l’économie à la diplomatie.

Sur les dossiers internationaux, il s’est ainsi permis certaines « libertés », tout particulièrement avec Kigali. A son initiative en avril, Brazzaville a signé pas moins de huit accords, protocoles, mémorandum, touchant au commerce, à la culture, à l’environnement, aux mines, à la jeunesse, ou encore au secteur de l’investissement (AI du 29/03/22). Fort de sa proximité avec le fils du président rwandais, Ivan Kagame, il n’a en revanche tenu informé qu’à la marge ses collègues du gouvernement, au premier rang desquels le chef de la diplomatie congolaise, Jean-Claude Gakosso.

Denis Christel Sassou Nguesso a ainsi personnellement supervisé la signature du PPP de la zone industrielle de Maloukou concédée au fonds d’investissement rwandais Crystal Ventures, proche du parti présidentiel du Front patriotique rwandais, qui comprend également la cession de terres agricoles (AI du 28/04/22). Or, le complexe est situé sur le débouché du futur point route-rail traversant le fleuve Congo, ce qui n’a pas manqué de susciter un certain agacement à Kinshasa au moment où les tensions dans l’est de la RDC s’intensifiaient autour du M23.

Loi sur les PPP

Projet phare au lendemain de son accession au ministère, la grande loi du ministre de la coopération internationale sur les PPP n’a toujours pas vu le jour. Lors d’un conseil des ministres, Denis Christel Sassou Nguesso s’est même vu demander par le président de « retravailler » le dossier. Le projet, finalement validé lors du dernier conseil des ministres du 13 août, devrait être présenté les prochaines semaines devant le parlement.

Son style suscite aussi certaines crispations au sein de l’équipe du premier ministre d’Anatole Collinet Makosso. Plusieurs ministres et cadres de la majorité présidentielle se sont ainsi directement émus auprès de la primature du train de vie du ministre. Parmi les éléments remontés figurent notamment le recours régulier à des jets privés lors de ses missions en Europe aux dépens de vols régulier Air France utilisés par les délégations.

« Kiki » continue néanmoins de disposer de soutiens au sein du gouvernement, à l’instar du ministre de la communication, Thierry Moungalla, ou encore d’Inès Nefer Ingani, ministre de la promotion de la femme et de l’intégration de la femme au développement. Un appui non négligeable dans une hypothétique course à la succession : cette dernière est en effet responsable de la section féminine du Parti congolais du travail (PCT), la formation politique au pouvoir au sein de laquelle « Kiki » manque cruellement de relais face aux barons.

En périphérie de l’entourage ?

Ces derniers mois, il est en revanche apparu à l’écart du premier cercle présidentiel. Il s’est notamment éloigné de l’influent conseiller spécial du président congolais Maxime Gandzion, qui est également son oncle par alliance.

Il fait aussi face à l’omniprésence auprès du chef de l’Etat d’Omar Denis Bongo Junior, petit-fils de Sassou, mais aussi de Rodrigue Nguesso, fils de Maurice Nguesso, frère aîné du chef de l’Etat. « Kiki » n’a ainsi pas été des vacances estivales du patriarche en Turquie, organisées par Maxime Gandzion et par la désormais incontournable conseillère franco-rwandaise, Françoise Joly (AI du 24/01/22). Il n’a pas non plus accompagné son père à l’investiture le 13 septembre du président kenyan William Ruto à Nairobi.

Une absence d’autant plus remarquée que le ministre de l’aménagement du territoire et des infrastructures, Jean-Jacques Bouya, faisait partie des deux escapades. En difficulté il y a encore quelques mois, Bouya – par ailleurs cousin de Sassou – a opéré un discret retour en se rapprochant notamment de Françoise Joly. Or ce poids lourd du gouvernement croise régulièrement le fer avec « Denis Christel » sur plusieurs dossiers stratégiques, à l’instar de celui de la créance congolaise contractée auprès du géant turc Summa, ou encore sur le redémarrage de l’activité de la compagnie aérienne ECair. L’accord de reprise de la société, signé avec l’investisseur sud-africain Allegiance Capital, apporté par Denis Christel Sassou Nguesso, est fortement contesté en interne (AI du 21/07/22).

Coup de com

Reste que si « Kiki » est en difficulté à Brazzaville, il continue de maintenir une com active, tout particulièrement à l’international (AI du 13/09/22). Il s’appuie pour cela sur une équipe de fidèles qu’il a constituée au ministère, toujours logé dans les anciens locaux de Cotrade, l’ancienne entreprise de trading de la Société nationale des pétroles du Congo (SNPC) dont il fut lui-même un cadre.

Au sein de son cabinet, il dispose de son propre spin doctor et ami personnel : l’homme d’affaires actif dans les médias, Vérone Mankou (AI du 13/09/22). Le patron de la webtv, Vox TV est à la tête de plusieurs sociétés de communication. Autre figure influente auprès du ministre : Nathalie Bumba, seconde épouse de « Kiki ». Cette dernière garde un regard sur le cabinet de son mari à travers le dir’ cab’ Max Monka, qui est également son pasteur à l’église de réveil Rehoboth de Brazzaville.

©️ Copyright Africa Intelligence.

16 recommended
0 notes
bookmark icon

Write a comment...

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *